Introduction
Le mot stratégie est dérivé du grec stratos qui signifie « armée » et ageîn « conduire ». Sa définition d’après le dictionnaire Larousse est : « L’Art de combiner l’action de forces militaires en vue d’atteindre un but de guerre déterminé par le pouvoir politique ». D’origine militaire, le concept de stratégie est utilisé depuis dans de nombreux autres domaines : jeux, sport et entreprise notamment.
Les premières théorisations de la stratégie d’entreprise apparaissent dans les années 50 (Havard Business School). Une des plus connues est l’approche de Michael Porter, portée sur l’avantage concurrentiel qu’une entreprise doit obtenir vis-à-vis de sa concurrence. Selon ce spécialiste de l’économie, une entreprise doit se construire un avantage concurrentiel décisif afin de maîtriser les forces de la concurrence. Ce modèle des stratégies génériques propose trois options distinctes : la domination par les coûts (offre de même valeur que celle des concurrents mais à un prix inférieur grâce à une réduction des coûts obtenue par une forte productivité), la concentration (offre ciblée à un segment du marché existant) et la différenciation (proposer une offre ayant des caractéristiques différentes de celle de la concurrence). Une différenciation par épuration élimine des éléments du service ou produit, les coûts diminuent mais pour une offre moins valorisante ; tandis qu’une différenciation par sophistication engendre des coûts supplémentaires pour l’entreprise.
W. Chan Kim et Renée Mauborgne sont deux chercheurs au Blue Ocean Institute à l’INSEAD. Après avoir examiné des centaines d’entreprises pendant 15 ans, ils ont identifié ce qu’ils appellent la « Stratégie Océan Bleu ».
1. Qu’est ce qu’une Stratégie Océan Bleu ?
Pour la comprendre, le mieux est de la comparer à la stratégie de l’Océan Rouge. L’Océan Rouge est l’approche traditionnelle : l’environnement du marché est connu, les entreprises s’y font la guerre (jusque au sang rouge…) pour gagner des parts de marché, les unes par rapport aux autres, face à une demande existante. L’aspect concurrentiel y est omniprésent.
La stratégie Océan Bleu vise à relancer une activité d’un marché jugé saturé et hyper concurrentiel, aux perspectives de croissance limitées. Pour cela, les auteurs préconisent d’abandonner l’obsession de l’affrontement et de chercher à créer et capturer une nouvelle demande.
La stratégie Océan Bleu met l’entreprise au défi de « sortir de l’Océan Rouge de la concurrence grâce à la création d’un espace stratégique vierge qui rend cette concurrence nulle et non avenue ». Elle ne cherche pas à s’adapter aux tendances économiques mais à créer ces tendances. Dans cet Océan Bleu, l’entreprise évoluera sans guerre concurrentielle car seule à y évoluer.
source : http://www.jca-institut.com
Créer une nouvelle demande peut passer par une innovation de produit ou service mais il est fondamental de préciser que celle-ci n’est pas seulement technologique. Elle se doit d’être une « innovation valeur ». C’est la base essentielle de la stratégie Océan Bleu. Cela signifie que l’innovation qui va créer cette nouvelle demande doit impérativement apporter de la valeur et ce non seulement pour l’entreprise (rentabilité), mais également pour l’acheteur (utilité).
Dans les Océans Rouges, la différentiation n’engendre pas un surcroit de valeur pour une des deux parties. La stratégie Océan Bleu pense possible et indispensable de poursuivre de front la réduction des coûts et l’augmentation de la valeur.
Schéma : Innovation valeur
Source : http://www.oceanbleu.be/ocean-bleu/sob
Les auteurs avertissent rapidement que suivre une stratégie Océan Bleu n’implique pas de prendre des risques mais plutôt de les réduire. Pour cela, plusieurs outils sont à notre disposition :
Le canevas stratégique.
Outil à utiliser à différentes étapes de la mise en place de la stratégie Océan Bleu. Il va permettre de réaliser un diagnostic puis orienter les actions à mener. C’est un graphique représenté par deux axes : en abscisses, la liste des critères qui ont de la valeur pour les clients du marché traditionnel dans lequel évolue l’entreprise actuellement ; en ordonnées, les performances de l’offre (traduites en terme de « basses » près de l’axe des abscisses, jusque « élevée » vers le haut du graphique). Lors du diagnostic, l’entreprise positionne la performance de l’ensemble de la concurrence pour chacune des caractéristiques. En général dans un marché hyper-concurrencé d’Océan Rouge, les concurrents ont un profil stratégique similaire. Certes, certaines entreprises essayent de se différencier mais soit elles sont rapidement imitées, soit elles ne créent pas de réel nouvel espace stratégique.
Exemple du canevas stratégique du marché de la console de jeux de salon
Source : http://www.blue-blog.fr/strategie-de-locean-bleu/nintendo-nage-en-plein-bonheur
L’erreur de toute entreprise (nouvelle ou pas) souhaitant se démarquer serait de suivre ces critères, c’est-à-dire de les prendre en compte dans la stratégie marketing. En effet, l’entreprise n’aurait plus comme solution que de dépasser ses concurrents sur la base de ces critères. Donc si le propre canevas stratégique d’une entreprise suit le profil du marché, alors celle-ci évolue dans un Océan Rouge.
Afin d’en sortir, il ne faut pas proposer une solution meilleure à celle existante, ce qui reviendrait à segmenter son offre pour une partie du marché et augmenter ses coûts. Mais plutôt, à partir du canevas stratégique, se concentrer sur les « non-clients » (marché qui est en général plus vaste que le marché de clients). En répondant aux besoins des non-clients, une nouvelle courbe très différente sur certains critères se profilera.
L’entreprise va maintenant utiliser la grille des quatre actions.
La suite : La grille des quatre actions ou grille ERAC (prochainement)